Tango Secret

07/01/2020


Ancien flûtiste du Cuarteto Cedrón, l’Argentin Luis Rigou s’est fait connaître à l’international (soixante disques d’or) sous le nom de Diego Modena, en jouant de l’ocarina à la sauce variète world des années 90. Il est resté fidèle à ses flûtes (droite, andine, traversière), mais on lui découvre aujourd’hui une voix à la patine émouvante, gorgée de la nostalgie de ses années protègnes et délicatement vieillie par trente années d’exil.

Avec la pianiste Céline Bishop et leur escorte hétéroclite (saxo, bandonéon, piano Fender Rhodes…), le chanteur et musicien revient ainsi aux sources du tango, moins pour exalter la virilité des gauchos d’antan, qui maniaient le couteau et le mot doux avec l’esprit canaille des faubourgs de Buenos Aires, que pour retrouver la spontanéité des premiers bals populaires. Déterrant tangos canciones aux accents primesautiers et milongas oubliées, il en souligne la nostalgie sans apprêt. S’approprie également des standards sud-américains, telles une célèbre complainte de Simon Díaz (Tonada de la Luna Llena), une milonga déchirante d’Atahualpa Yupanqui, ou la fameuse Que nadie sepa mi suffrir, Angel Cabral (devenu La Foule par Edith Piaf).
Le tout résonne avec tendresse, comme le profond soupir d’un petit peuple aux passions éreintées.
Anne Berthod